EXCLU : Accord avec la WWE, WrestleMania, son avenir... Il se livre sur son aventure
Bernard Colas -
Journaliste
Passionné de sport, de cinéma et de télévision (à l’écran comme derrière) depuis son enfance, Bernard est journaliste pour le 10 Sport depuis 2018. Plus habile clavier en main que ballon au pied, il décide de couvrir principalement un sport adulé, critiqué et détesté à la fois (le football) et un sport qui n’en est pas un (le catch).

Commentateur de la WWE depuis plus de vingt ans, Christophe Agius est aujourd’hui considéré comme la voix du catch en France, fort de ses passages sur RTL9, NT1, La Chaîne L’Equipe et désormais AB1, qui diffuse chaque semaine les programmes hebdomadaires de la compagnie. Ses débuts, son parcours, son bilan de l’année 2023 mais également son avenir, il se raconte.

Vous êtes commentateur de catch et de la WWE depuis désormais plus de 20 ans, comment êtes-vous tombé là dedans ? Comment est venue cette passion ? 

Il faudrait plutôt dire comment cela m’est tombé dessus ! C’est une vieille histoire qui date des années 80. À l’époque, ça passait sur Canal + et je regardais ça avec un voisin qui était mon "sparring partner" en quelque sorte. Avant il n’y avait pas de message : "ne faites pas ça chez vous", donc on s’amusait chez lui et chez moi. Je suis devenu fan comme ça quand j’avais 7 ans. Ensuite, j’ai pu avoir internet, j’ai créé une newsletter dans les années 90 où je faisais mon journaliste amateur. J’écrivais notamment des articles. Au début des années 2000, j’ai passé un casting à Paris. Je n'étais pas très bon pour ne pas dire mauvais, mais j’ai quand même été pris. Je le dois principalement à Philippe Chereau. Lorsque le directeur du casting a dit : "on ne peut pas le prendre, il a une voix de m*rde", Chereau a dit à ce moment-là : "c’est vrai qu’il a une voix d’enfant mais on a fait quarante minutes d’essai, on n’a pas coupé donc je pense qu’on peut essayer de faire quelque chose".

Justement avec Philippe ça fait des années que vous commentez le catch ensemble. Comment s’est faite votre relation au début ? Et comment expliquer que cela fonctionne aussi bien dans le temps ?

Au début, la relation était très simple. C’est un duo de commentateurs et ce qui est amusant, c’est que l’on ne savait absolument pas que ça allait durer. Au bout d’un an, ça s’est arrêté parce que l'on commentait une autre fédération qui avait fini par fermer (WCW, ndlr). Ensuite, elle a été rachetée par la WWE et on a dû attendre presque un an avant de recommencer à commenter mais cette fois-ci la WWE. Ça s’est fait naturellement. J’ai eu la chance de tomber sur Philippe qui est quelqu’un d’extrêmement généreux et qui a compris à ce moment-là que lui n’était pas spécialiste de catch. Il savait parler dans un micro et il fait ça depuis l’âge de quinze ans, donc il connaissait parfaitement le métier. Il savait que moi, je pouvais apporter la connaissance du catch, le côté passion que j’avais déjà depuis quinze ans. Lui ne pouvait pas me rattraper tout de suite, donc il a eu l’intelligence de m’utiliser pour mes qualités et d’essayer de cacher mes défauts. Et pourquoi cela dure aussi longtemps que ça ? C’est facile à dire. Tout simplement la chance que les chaînes pour lesquelles on a travaillé nous aient fait confiance ainsi qu'au programme de catch. Ça s’est fait naturellement et là on va fêter nos 24 ans de duo.

Vous voyez-vous terminer votre carrière dans le milieu du catch ?
 
Je n’ai pas trop le choix ! Là, je suis foutu ! (rires) Moi, je suis quelqu’un qui vit avec l’idée que ça peut s’arrêter à tout moment. Psychologiquement, après 24 ans, c’est dur de se dire que cela peut être le cas. J’ai l’impression qu’à la fois, c’est formidable et à la fois un peu malheureux. Je suis cantonné à ça. J’aimerais faire évidemment autre chose. Aujourd’hui, avec la vie que j’ai, j’ai cette occasion. Je fais désormais des voix dans des documentaires pour Arte. Mais c’est vrai que le catch reste mon métier principal donc si par chance on me laisse travailler jusqu’à la retraite, mais ça j’ai encore de nombreuses longues années à tenir jusque-là, ça serait magnifique. Après ce sont les aléas de la télévision.


Il y a une émission qui fonctionnait très très bien à l’époque, c’était Catch Attack (diffusé sur NT1 en prime time). Ça a permis à de nombreux fans français de connaître le catch américain. Êtes-vous un nostalgique de cette époque ?

Pas vraiment. On se l’est souvent dit avec Philippe, mais c’est une époque où nous, on ne se rendait pas forcément compte que cela marchait du feu de dieu. On n’avait pas d’enfant à l’école qui aurait pu nous dire : "il y a tous mes copains qui parlent de catch". Donc nous on était là, la tête dans le guidon, on travaillait énormément tous les jours et en conclusion, ce n’était pas une période si folle que ça.


La dernière actualité est toute récente puisqu’AB1 va diffuser WrestleMania et le Royal Rumble. Qu’avez-vous ressenti quand vous avez appris la nouvelle ?

J’étais heureux ! En toute franchise, cela ne s’est pas décidé hier. Ce sont des négociations qui durent depuis déjà pas mal de temps. Nous, on nous tient au courant sans parler des prix ou de ce genre de choses. Parfois, certains trucs ne se font pas et tombent à l’eau, parfois d’autres se font. Mais en tout cas, on attendait l’annonce officielle. On adore avec Philippe le Royal Rumble et pouvoir fêter WrestleMania 40 avec les téléspectateurs du groupe Mediawan, c’est parfait.

« CM Punk ? Je ne pensais pas que ça allait arriver un jour »

Commen prépare-t-on un gros évènement comme le Royal Rumble et WrestleMania en tant que commentateur ?

N’ayant pas fait d’études, je ne sais pas comment les vrais professionnels travaillent. D’ailleurs, Philippe non plus. Il a fait une école de radio pour être animateur, mais ce n’est pas comme les gens qui font des écoles de journalisme. On leur apprend des méthodes de travail et nous c’est sur le tard que l’on a appris ça. En ce qui concerne le Royal Rumble, qui est un show vraiment particulier parce qu’il y a les trente superstars (hommes et femmes), et avec les arrivées toutes les deux minutes, j’essaye de préparer au maximum la liste des catcheurs que l’on connaît avant. Évidemment, je les connais en général tous, puisque je fais aussi les shows hebdomadaires et c’est plus simple pour moi. À la WWE, si on fait tous les shows en amont, on connaît toutes les histoires et comment cela se passe. C’est plus une préparation au niveau des citations ou des petites formules pour rendre le moment un peu plus unique. Même si je l’ai appris à WrestleMania 30 avec la défaite de l’Undertaker que je n’attendais pas du tout. C’est Michael Cole (commentateur américain) qui m’avait dit : "le mieux c’est de te préparer quel que soit le résultat". Depuis, j’essaye psychologiquement de trouver des mots, je me mets sur un petit cahier des formules que j’utilise ou pas selon l’instant pour me mettre dans l’émotion.


Parce que vous n’êtes pas du tout au courant en amont du résultat d’un combat ?
 
Non, jamais. Dans le meilleur des cas, quand on est sur place, on nous donne le programme du show. C’est-à-dire la liste des matches et des segments qui peuvent arriver. Pour prendre l’exemple de WrestleMania 30, on nous a donné le programme du show et le premier segment c’était, Steve Austin, The Rock et Hulk Hogan qui ouvraient le show et sur notre feuille, il y avait un trou. Il y a un segment, on sait ce qu'il va se passer quelque chose, mais même pour nous, ils n’avaient rien mis.
 

Pareil avec les Hardy Boys ?

Oui et là, c’était encore plus secret. À WrestleMania, on avait vu qu’Hulk Hogan était dans les vestiaires mais c’est normal puisque c’est WrestleMania et tu croises des légendes. Là, les Hardy Boys, ils les avaient caché totalement et personne ne savait qu’ils étaient présents. Comme CM Punk.


Justement, qu’en pensez-vous du retour de CM Punkdix ans après ?

Énormément surpris parce que je ne pensais pas que ça allait arriver un jour. J’en ai vu revenir des mecs qui n’étaient pas censés faire leur come-back. Que ce soit Hulk Hogan ou même Steve Austin qui était en froid avec la WWE, et plus loin encore l’Ultimate Warrior. Mais CM Punk, je ne m’y attendais absolument pas. D’ailleurs, le show se terminait, il y avait le petit logo en bas qui signifiait que c’était la fin. On était même à deux doigts de poser nos micros-casques. Mais je suis plutôt heureux. J’aime bien quand les gens finissent par se réconcilier et en plus cela profite à tout le monde. À Punk, la WWE et surtout les fans.

Votre meilleur moment de RAW de l’année 2023, c’est l’évolution de Rhea Ripley. Pourquoi ce choix ?

Je pense que c’est l’âge ! (rires) J’ai eu énormément de mal à trouver un instant précis à RAW sur toute l’année. Sur les moments récents par exemple, il y a eu un match avec les Creed Brothers et le Judgment Day mais c’était deux semaines avant. Il y a eu aussi plein de moments dingues dans les PLE comme par exemple, Sami Zayn contre Roman Reigns. Mais on commente RAW et SmackDown toutes les semaines, et j’ai beaucoup de mal à graver des choses dans mon esprit tellement ça avance vite. Mais Rhea Ripley, j’avais annoncé en 2022 qu’elle serait la femme de 2023. Au final, c’est une Superstar tous sexes confondus avec le Judgment Day.
 

Pour terminer, avez-vous une anecdote à partager sur une Superstar que vous avez pu croiser en coulisse ?

Oui, il y en a pleins ! Mais l’une des plus mémorables, c’était à Brooklyn au Barclays Center. À WrestleMania on est convoqué en général à 11 heures sur le parking. On devait attendre que notre contact sur place arrive pour nous donner des badges. C’est WrestleMania, il y a beaucoup de monde, de sécurité donc on a dû attendre assez longtemps. Au final, les gars de la sécurité avaient une liste de noms et ils nous connaissaient donc on a pu rentrer. On se promène, on sait dans quelles pièces on doit se rendre. On marche, on ouvre une porte et de l’autre côté, c’est l’Undertaker. Je pense qu’il a été aussi surpris que nous parce qu’il allait également ouvrir la porte. Il a eu un petit mouvement en arrière, il nous fait : "Hi guys" (salut les mecs, NDLR) et il nous serre la main. Pour le petit gamin que j’étais, qui a suivi sa carrière, c’était un moment assez dingue.


Propos recueillis par Enzo Parant.

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