Après la NBA et l’UFC, la WWE en route pour enflammer Paris ?
Bernard Colas -
Journaliste
Passionné de sport, de cinéma et de télévision (à l’écran comme derrière) depuis son enfance, Bernard est journaliste pour le 10 Sport depuis 2018. Plus habile clavier en main que ballon au pied, il décide de couvrir principalement un sport adulé, critiqué et détesté à la fois (le football) et un sport qui n’en est pas un (le catch).

Cardiff, Londres et maintenant Berlin… en attendant Paris ? La WWE poursuit sa stratégie d’internationalisation en enchaînant les grands shows en Europe, et ailleurs à travers le monde, et semble prendre le chemin de la capitale française, là où la NBA et l’UFC ont choisi de poser leurs valises ces derniers mois pour un grand rendez-vous unique. Les indices en ce sens se multiplient.

Après avoir rencontré un immense succès en France à la fin des années 2000, le catch revient en force malgré une diffusion toujours confidentielle, les shows de la WWE étant proposés sur la chaîne du câble AB1. Chaque année, la principale structure de ce divertissement sportif qui promet d’incroyables spectacles est de passage en France et s’arrête le temps d’une soirée à l’Accor Arena pour une exhibition non télévisé. Et après deux éditions particulièrement appréciées en interne, l’idée d’aller encore plus loin fait son chemin à la WWE

Le tour d’Europe de la WWE

Le public tricolore semble en effet bien parti pour profiter de la stratégie d’internationalisation développée par la WWE ces derniers mois. Après avoir effectué son retour en Europe et au Royaume-Uni à l’été 2022 du côté du Principality Stadium (ex-Millennium Stadium) pour la première fois depuis 30 ans, la compagnie a ensuite multiplié les infidélités aux États-Unis pour ses pay-per-view (qu’elle appelle PLE, acronyme de Premium Live Event), se déplaçant au Canada (Montréal pour "Elimination Chamber" en février 2023), Puerto Rico (San Juan pour "Backlash" en mai 2023) puis l’Angleterre (Londres pour "Money in the Bank" en juillet 2023), sans compter ses passages réguliers en Arabie saoudite, fruit d’un très fructueux partenariat démarré en 2018 d’une durée de 10 ans, le prochain événement ayant lieu à Riyad le 4 novembre prochain pour "Crown Jewel". Le dernier déplacement des stars de la WWE en cette année 2023, avant de reprendre la route dès début 2024 avec l’organisation d’Elimination Chamber en Australie (Perth), en février. 

Un choix qui porte ses fruits, la WWE multipliant les records sur les recettes engendrées et les ventes de merchandising, tout en profitant de l’engouement suscité à travers le monde pour ces pay-per-view flamboyants en enregistrant des audiences en forte hausse via sa plateforme WWE Network ainsi que sur les vidéos partagées sur ses réseaux sociaux. Après avoir rempli l’O2 Arena de Londres l’été dernier, la WWE annonçait fièrement avoir organisé l’événement le plus rentable de son histoire dans une arène (hors stade). La compagnie avait récolté plus de 5,4 millions de dollars sur le week-end avec la programmation la veille, toujours à l’O2, de son émission hebdomadaire Smackdown. La volonté de vouloir explorer d’autres marchés et de développer sa marque à l’international, avec un public répondant présent et s’arrachant les places disponibles, apparaît déjà comme un pari payant et parti pour durer, avec l’officialisation par la fédération de catch cette semaine d’un nouveau show, cette fois-ci en Allemagne, et ce pour la première fois depuis la Mercedes-Benz Arena le 31 août 2024 pour "Bash in Berlin". 

Et la France dans tout ça ? Alors que la déception se faisait ressentir parmi les suiveurs assidus de la WWE à l’annonce de "Bash in Berlin", le très sérieux site spécialisé Fightful a révélé quelques heures plus tard qu’un autre pay-per-view européen était dans les tuyaux, du côté de Paris qui pourrait succéder à Puerto Rico pour accueillir Backlash au printemps 2024. Approchée par nos soins, une source a voulu garder le secret et n'a ni confirmé ni infirmé la préparation d’un tel show dans la capitale. Si rien n’est donc encore finalisé, la réflexion est en tout cas grande en interne pour organiser le premier PPV de la WWE en France. Un projet étudié depuis déjà un certain temps. 

Les talents de la WWE poussent pour débarquer à Paris

D’après nos informations récoltées à l’issue du dernier show (non télévisé et donc sans grand enjeu) à l’Accor Arena, réunissant plus de 12.000 spectateurs le samedi 29 avril 2023, l’ambiance mise par le public français avait impressionné les membres de la WWE, répétant dans les coulisses qu’ils n’avaient pas connu ça depuis plusieurs années. Preuve de cet emballement général, le show avait même dépassé la durée initiale, s’achevant par une véritable déclaration d’amour de l’une des stars de la compagnie, Cody Rhodes, envers les spectateurs parisiens : « Ce n'est que spéculation, mais ça vient du fond de mon cœur. Je pense que Paris mérite un bon vieux PLE ». « Paris est maintenant dans la liste des meilleurs publics de catch de tous les temps », confirmait le lendemain sur X (ex-Twitter) le producteur de la WWE Shane Helms présent sur place.

« Il y avait une énergie différente. Tu pouvais littéralement sentir la salle bouger, se souvenait l’ancienne championne du monde de la WWE Bayley l’été dernier lorsque nous l’avions interrogée à Londres à la veille de Money in the Bank. Le PPV à Paris ? J’ai l’impression qu’on fait tout pour aller dans cette direction, surtout après ce show (à l’Accor Arena). (…) Alors faisons-le ! » Même son de cloche chez le catcheur Santos Escobar, déjà emballé par l’idée à notre micro : « J’adorerai combattre à Paris. C’est une des villes dont je suis amoureux, la culture elle-même. Un show à Paris ? J’espère, effectivement. Je serai là pour une semaine. » « Si nous venons en France pour faire un PLE, je le ferai », se projetait quant à lui LA Knight, devenu l’un des talents les plus populaires de la WWE ces derniers mois. 

Plus qu’un simple rêve, l’idée fait bien son chemin à tous les étages de la WWE. « On y croit très très très fort », déclarait l’une des deux voix mythiques du catch en France, Christophe Agius, invité de l’émission Zack en Roue Libre sur Twitch en juin dernier. « Il y a des choses qui se préparent, maintenant il faut juste que les planètes s’alignent, glissait son acolyte commentateur depuis plus de vingt années Philippe Chereau. Mais en tout cas, il y a - on l'espère - de belles surprises à venir. » 

Le fantasme du #WWEStadeDeFrance

Dans quel lieu pourrait alors se tenir le Blacklash parisien à l’étude du côté de la WWE ? Les fans ne cachent pas leur rêve de voir la folie catch s’emparer du Stade de France après la réussite populaire et financière de "Clash at the Castle" au Millennium Stadium. Hashtag bien connu des spécialistes, le #WWEStadeDeFrance est né quelques heures après l’annonce surprise du catcheur Drew McIntyre, citant en décembre 2022 l’enceinte de la région parisienne comme un endroit possible pour accueillir un grand spectacle de la WWE qui se rapprocherait alors davantage d’un gros barnum que peut être WrestleMania aux Etats-Unis, réunissant chaque année des dizaines de milliers d’aficionados venus des quatre coins de la planète dans la ville hôte. « On peut aller dans le monde entier. S'il y a de la demande pour la WWE, on sera là. Pourquoi pas... Paris, en France ! Ils ont un petit stade qui s'appelle le Stade de France avec 80 000 places et je sais qu'on peut le remplir », lançait l’Écossais dans l’émission Raw. Un message qui n’est pas passé inaperçu dans l’hexagone, le #WWEStadeDeFrance étant depuis utilisé par les fans sur les différents sociaux pour afficher leur enthousiasme.

Problème, l’organisation des Jeux olympiques de Paris (du 21 juillet au 11 août 2024) empêche toute manifestation sportive et culturelle à Saint-Denis dès le début d’année. Des travaux de mise en conformité vont avoir lieu, obligeant notamment la FFF à relocaliser les matchs à domicile de l’équipe de France durant la période internationale de mars et la finale de la Coupe de France en mai, ou encore la LNR à programmer la finale du Top 14 à Marseille. « Ça complique un petit peu les choses, on nous l'a même précisé, il y a eu quand même des discussions déjà, révélait Christophe Agius dans l’émission Zack en Roue Libre. Et le Stade de France leur a dit : "On a un petit évènement qui s'appelle les JO" ».

Mais les Jeux ne sont pas forcément qu’un obstacle à l’organisation d’un tel spectacle à Paris, la WWE ayant l’occasion d’assimiler sa marque à celle de la ville hôte du plus grand événement multisports du monde. Roman Reigns, champion incontesté de la WWE depuis août 2020, a d’ailleurs prêté son image dans le cadre d’une campagne publicitaire de NBC, diffuseur américain des JO. Sans Stade de France, et si la structure de l’Accor Arena pourrait apparaître trop petite pour les ambitions de l’entreprise américaine, Paris La Défense Arena apparaît en revanche comme le compromis idéal selon les disponibilités de la plus grande salle d’Europe qui peut accueillir jusqu’à 40 000 spectateurs, un élément susceptible de séduire la WWE, avide de nouveaux records, qui pourrait ainsi succéder à la NBA et l’UFC parmi les grandes marques américaines de sport souhaitant accroître leur popularité en France.

Le cas de la prestigieuse ligue de MMA est encore plus intéressant, celle-ci ayant fusionné au cours de l’année avec le mastodonte du catch pour former la nouvelle entité TKO Group, désireuse à l'avenir de proposer des événements en commun. « Ce que tout le monde envisage, c'est la possibilité d'organiser un week-end TKO avec SmackDown le vendredi, l'UFC le samedi avec le pay-per-view et la WWE avec un événement en direct le dimanche, déclarait récemment le président de la WWE Nick Khan dans The Bill Simmons Podcast. Est-il possible de faire cela dans la même ville ? Il y a certainement beaucoup d'économies à faire en termes de production, mais il y a aussi beaucoup d'économies à faire en termes de revenus. » Un point de vue effectivement partagé par le directeur général de l’UFC Lawrence Epstein, affichant auprès d’ESPN le souhait de voir sa compagnie et la WWE concevoir d’importants événements le même week-end dans une ville. Celui-ci s’était justement montré ambitieux l’année dernière concernant le développement de l’UFC à Paris, alors que deux shows ont déjà eu lieu. « Nous avons fait des événements dans plusieurs stades à travers le monde et si c’est le bon combat, on peut le faire ici aussi, confiait-il en 2022 à RMC. Nous sommes surtout là sur le long terme en France. Nous avons dans l’idée de faire un événement par an à Paris. » Les fans de la WWE signeraient déjà pour un seul PLE de leur compagnie favorite.

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