Solitude, timidité, célébrité : la face cachée de Christophe Lemaitre
La rédaction

Qualifié in extremis pour la finale du 200m, à 21h55, Christophe Lemaitre rêve d’accrocher une première médaille olympique, même si la tâche s’annonce compliquée. Ce serait une belle revanche pour l’enfant de Culoz, qui n’a pas connu une enfance facile.

Pas d’autisme, juste de la timidité
Christophe Lemaitre, malgré ses excellentes performances, est souvent sujet aux moqueries sur les réseaux sociaux pour sa diction approximative et son fameux cheveu sur la langue. « Certains ont dit qu’il y avait quelque chose de pathologique chez Christophe. Un journaliste, à la radio, a même parlé d’autisme. C’est n’importe quoi, s’insurge sa mère, Marithé, dans le JDD. Je suis infirmière psychiatrique, je sais de quoi je parle. Mon fils est juste très timide. » « Au début, j’ai cru qu’il était limite autiste, reconnaît toutefois Pierre Carraz, son entraîneur de toujours à Aix-les-Bains. Mais en le voyant à l’aise avec les autres, j’ai compris qu’il n’y avait pas de souci.»

Les médias, « un cauchemar »
Mardi midi, après son entrée en lice sur 200m, Christophe Lemaitre a passé quasi une demi-heure à répondre en zone mixte aux questions des télévisions internationales. Un sacré exploit pour l’enfant de Culoz, qui a du mal à se faire à toutes ces sollicitations médiatiques. « Un cauchemar », avoue Lemaitre au JDD. « Oui, ça m’emmerde de répondre aux questions, précise-t-il. Parler, ce n’est pas mon truc. Parler de moi encore moins. » « Ce n'est pas ce que je préfère. Je ne suis pas toujours très concentré, surtout quand ça dure, mais ça va », ajoute-t-il à L’Express. Il préfère se réfugier dans sa « bulle » : « Dedans, il y a juste le nécessaire : ma vie privée, ma famille, la compétition et un quotidien normal d’étudiant. »

Un solitaire affirmé
L’exubérance d’Usain Bolt tranche avec l’expansivité de Christophe Lemaitre, très discret sur la piste mais aussi en dehors. « J’étais solitaire, du genre à rester des heures dans ma chambre, explique le sprinteur tricolore au JDD. Mes parents m’ont poussé vers différents sports, foot, rugby, hand… pour me faire sortir, découvrir des gens. Mais je n’arrivais pas à me fondre dans le collectif. » « Je ne me doutais pas que j'avais un talent dans quoi que ce soit, appuie-t-il dans L’Express. Je pensais... que je n'étais rien, en fait. Je ne répondais que par "oui", "non", "je sais pas"... J'étais très introverti. L'athlé m'a ouvert aux autres, c'est sûr. »

Une enfance difficile
C’est avec un petit sourire intérieur, aujourd’hui, que Christophe Lemaitre croise ses anciens camarades de classe lorsqu’il se balade dans Culoz. Non pas par mépris ni arrogance, tout simplement parce qu’il le voit comme une petite revanche. Plus jeune, à l'école, le petit Christophe était un peu la risée des autres. « Il était méprisé par les autres, c’est vrai, se souvient Florence Denis, sa prof d’histoire-géo au collège. À l’adolescence, tout le monde se sent nul ou moche. Christophe refusait simplement de tricher avec ça en faisant le m’as-tu-vu ou en entrant dans le rapport de force. Les autres le lui faisaient payer. » « Aujourd'hui, ils ont tout oublié et me traitent comme si j'étais leur pote ! Moi je sais que cette époque a existé, assène le « TGV de Culoz ». Je ne suis pas du genre à aimer les embrouilles, mais si je pouvais revenir en arrière, je leur tiendrais tête. »

La célébrité, c’est pas son truc
La célébrité, le business, ce n’est vraiment pas le truc de Christophe Lemaitre. S’il est aujourd’hui l’un des athlètes français les mieux rémunérés, le sprinteur n’hésite pas à dire non à des meetings rémunérés plusieurs milliers de dollars (Bruxelles et Zurich cette année). « Je m'en fous, en fait. Ce qui compte, c'est courir », se justifie-t-il dans un entretien accordé à L’Express. Pareil avec l’argent des gros contrats qu’il a pu signer au fil des années : « Je me suis acheté un appartement à Aix, des meubles et une grande télé pour aller avec, mais rien d’extraordinaire. Mon vrai rêve, ce serait de partir en croisière. Peut-être après Londres, on verra... »