EXCLU - Rémi Talès : «La mêlée, la discipline, et Ramos en feu»
La rédaction

Rémi Talès était au Stade de France hier soir pour apprécier la victoire des Bleus face aux All Blacks. L’ancien ouvreur international, désormais entraîneur à La Rochelle, s’attendait à un match plus ouvert. Mais il savoure la domination de l’équipe de France et la formidable sérénité qui transpire chez les coéquipiers d’Antoine Dupont. 

Rémi, ce choc entre la France et la Nouvelle-Zélande était-il conforme à ce que vous attendiez ?

Je ne suis pas surpris du match. C’est un premier match de Coupe du monde. Mais je m’attendais à un match un peu plus aéré. Un peu plus de jeu. Je pense que les conditions météo, avec cette chaleur moite, n’ont pas aidé à mettre du rythme. Mais vu qu’il y avait eu quatre matchs de préparation pour les Bleus, je pensais que ça allait vraiment partir tambour battant. Là, dès le début, la stratégie a été claire. Il fallait gagner l’occupation. C’est ce que les Français ont fait, surtout en deuxième mi-temps. Ils ont systématiquement cherché les espaces libres dans le champ profond.

Les Français se sont montrés fébriles en défense avec notamment vingt-deux plaquages manqués en première période. Est-ce le point noir du match ?

C’est vrai qu’on s’est fait pas mal breaké en première main. Pour le coup, les Blacks avaient bien étudié la défense française. Mais peut-être aussi que c’est à cause de l’adrénaline, et de la pression. Ça peut expliquer que tu loupes pas mal de plaquages en défense. C’est un peu à l’image de leurs vingt premières minutes. On sentait qu’en attaque, en défense, ou dans le jeu au pied, les Bleus étaient un peu timorés.

Est-ce aussi du à la réorganisation défensive avec la présence de Matthieu Jalibert ?

Je ne sais pas. C’est sûr qu’il y avait des automatismes avec la présence de Romain Ntamack et Jonathan Danty. Et là avec Moefana et Jalibert, il y en avait peu. Cela peut expliquer le manque d’habitude dans le repositionnement de Matthieu Jalibert en défense.

Qu’avez-vous pensé de son match ?

Il a été décisif. C’est un match qui va lui faire du bien pour la confiance et pour la suite de la compétition. Il a eu quelques déchets dans son jeu au pied, notamment la pénaltouche qu’il ne trouve pas en première période. Mais après il a très bien mené le jeu. Il joue très bien le coup pour donner un ballon d’essai à Damian Penaud. Petit à petit on a senti qu’il prenait la mesure du poste. Il est là, il s’impose.

«On a l'impression que les Blacks avaient zéro solution»

Quel regard portez-vous sur le jeu des All Blacks qui a parfois manqué d’inspiration ?

Complétement. Surtout en deuxième mi-temps, je les ai trouvé vraiment en manque d’inspiration. D’habitude c’est une équipe qui est hyper pragmatique et qui ne se trompe jamais. Mais mis à part le premier quart d’heure de la deuxième période durant lequel ils marquent un essai après un en-avant de deux mètres, ils sont systématiquement dans leurs vingt-deux mètres. Je trouve qu’Aaron Smith, Beauden Barrett et Richie Mo’Unga trient très mal les ballons. Ils se sont entêtés à sortir les ballons à la main et ils ont pris que des contres. Du coup on les constamment laissés sous pression. On a l’impression qu’ils avaient zéro solution.

Est-ce le constat d’une équipe en crise actuellement ?

En crise, je ne sais pas. Mais c’est une équipe qui doute. Il ne faut pas se le cacher. C’est une équipe qui ne domine plus son sujet comme elle a pu le faire pendant des années et des années. Aujourd’hui, ils sont comme tout le monde. Et quand tu domines moins et que tu gagnes moins les collisions, tu fais plus d’erreurs et tu deviens fébriles. C’est ce qui s’est passé hier avec les All Blacks.

Les Bleus en revanche n’ont fait que quatre fautes. La discipline a-t-elle été la clef du match ?

C’est une statistique de très haut-niveau. C’est aussi ce qui a fait la différence car les Blacks ont eu très peu de tentatives de pénalité ou de pénaltouches. Et en plus je trouve que la zone des rucks auraient pu être beaucoup plus pénalisés côté Blacks. J’ai vu des mecs plonger. C’était un peu n’importe quoi. Mais côté français, quand tu as la mêlée, la discipline, et Ramos en feu, même dans un match où tu n’es pas à ton meilleur niveau rugbystique, tu mets 30 points aux All Blacks.

Avec un peu recul, battre les All Blacks en étant moyen, n’est-ce pas une grande satisfaction ?

Oui, c’est fou. La roue tourne. D’habitude on faisait des bons matchs mais on ne gagnait pas. Et désormais, on est à deux victoires consécutives contre eux. Je ne sais même pas si c’est déjà arrivé. C’est vrai que les Bleus n’ont pas été à leur meilleur niveau. On a senti un peu de fébrilité, un manque de rythme. Le jeu n’était pas léché. Mais ils sont terriblement solidaires, il y a un état d’esprit de fou, et il lâche jamais. Et ils ne paniquent jamais. C’est fort et c’est beau de les voir. Parce que même quand on a l’impression qu’ils sont amorphes, ils ne paniquent jamais, ils restent dans le match, ils sont hyper réalistes. Là on voit le travail qui est fait depuis quatre ans.

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